Les joyaux de Lionel Vinche
L’art de la figuration a ses variantes innombrables.
La plus agréable laisse libre cours à l’imagination,
à la verve poétique
Une épatante exposition, l’artiste Vinche
ne s’étant jamais aussi remarquablement éclaté
! Nous connaissons ce poète du petit détail quotidien depuis
belle lurette et si, depuis toujours, nous souscrivons pleinement à
son imagerie cocasse, savoureuse, ludique, tendre et saugrenue, il fut
un temps où le Vinche se perdit en de moins fécondes abstractions.
Maintenant qu’il s’en est revenu à des amours qui lui
collent mieux à la peau, ne ménageons pas notre plaisir.
L’ancien marinier n’a pas son pareil, en effet, pour faire
chanter et colorer de joies vives la banalité des heures et des
jours. C’est que, sous sa patte d’esthète de province,
Vinche avoue un cœur gros comme la lune. Il est bien seul à
pouvoir saisir comme il le fait l’anodin et l’anecdotique.
Or, miracle de l’art, sous son pinceau voilà que de modestes
instants de l’existence s’animent de vérités
plus authentiques et profondes que tant de balivernes jugées exemplaires
!
Qu’il s’ensoleille du côté de Saint-Rémy
de Provence ou s’abreuve aux eaux grises de la mer du Nord, Vinche
demeure cet éternel émerveillé qui se bâtit
un univers avec trois fois rien. Ce qui est « quelque chose »,
le génial Devos nous l’a suffisamment démontré.
Lionel Vinche est de cette trempe. Quand il plonge son pinceau dans l’eau
et la couleur, ce n’est jamais pour du futile. Si l’art poétique
est le plus sûr moyen pour parvenir sans coup férir jusqu’aux
dieux, les voies de cet exercice sont pénibles à plus d’un.
Or, Vinche semble se les êtres appropriées depuis toujours.
Il a, pour y parvenir, une manière bien à lui de procéder.
Qu’il se retrouve face à la mer ou face à n’importe
quel environnement, le peintre brosse, comme à plaisir, et il en
est bien ainsi, de très petites vignettes emplies de sa petite
émotion passagère.
Une émotion que, souvent, il répète à l’envi,
variant simplement la composition, la coloration, le style d’écriture,
l’impression fugitive et tenace. Chaque instant béni est
de la sorte préservé de l’oubli, sorte de journal
de bord composé de mini-feuillets alignés à la queue
leu leu. Et c’est bien plus tard, de retour dans l’atelier,
que le peintre nous fomentera sa petite révolution plastique en
nous composant de plus vastes fresques, les petits papiers d’hier,
encolés sur une toile, alignant à perte de vue des histoires
qui, répétées de vignette en vignette, divulguent
ensemble une histoire complète qui a de la pêche, du tonus
et dégage une ambiance digne des meilleurs funambules.
Vinche joue ses partitions sur les cordes sensibles du plus délicat
des équilibres, entre vérité et irréalité,
entre subtilité et cette poésie de l’instant qui se
savoure à perte d’haleine. Qui plus est, dans cette exposition,
Vinche multiplie les cordes graphiques à son arc et c’est
un régal de les découvrir.
Roger-Pierre Turine
La Libre Belgique, Mercredi 16 mars 2005
Chaque jour, Lionel Vinche écrit une page de son carnet de bord.
Cet ancien bâtelier, devenu artiste par nécessité,
nous embarque sur les flots de l’aventure humaine.
Spectateur avide de tout ce qui l’entoure, il nourrit une curiosité
de la vie.
Un lapin, une femme, une vache, la mer… Les acteurs et éléments
visibles côtoient l’indiscible des sentiments, du souffle,
des « ondes » de communication entre les êtres.
Ce fascinant mélange s’accomplit dans des saynètes
où dessin et écriture s’entremêlent. Le trait
devient tantôt image, tantôt parole.
La narration, parfois drôle, parfois critique, est toujours étonnante
de vérité. Lionel Vinche revisite le réel en « clair-obscur »
– à l’instar de la plupart de ses compositions –
et nous offre une vision pertinente et poétique de l’absolu
de la vie.
Son œuvre est « le journal d’une vie »
qui confronte le visible et l’invisible, le vécu et l’émotion,
reflet d’une « joie songeuse », comme l’écrit
son ami philosophe Max Loreau.
Carine Fol,
janvier 2005 |